Aux mères d’hier, je voudrais dire qu’elles ont fait de leur mieux avec les connaissances qu’elles avaient. C’est-à-dire sans Internet et avec l’image du médecin qui sait tout qu’il faut écouter à la lettre. Avec peu de littérature de qualité et probablement avec une pression sociale très forte. Bien plus forte qu’aujourd’hui. Enfin non, pas plus forte, c’est juste que grâce à tout ce qu’on sait aujourd’hui, on peut plus facilement s’en affranchir. Mais à l’époque on le pouvait probablement moins et on suivait ce que nos mères / tantes nous disaient… Elles qui avaient connu l’avènement du sacro saint lait artificiel et la montée en puissance du lobby laitier… Elles qui avaient été persuadées par d’autres que le lait de femme n’était que de l’eau et qu’il fallait au plus vite passer au “vrai” lait (le lait artificiel en boîte ndlr.), indispensable à la croissance du nourrisson et du jeune enfant…

Je comprends les féministes d’hier. Elles ont œuvré à une époque où elles ont eu besoin de s’affranchir de leur maternité et de sortir de leurs foyers pour faire ce qu’elles avaient envie : travailler ou simplement vivre leurs rêves de femmes ! On parle d’une époque où la maternité n’était probablement pas choisie, et beaucoup trop souvent subie. D’une époque sans contraception où la femme ne pouvait pas faire ce choix assumé de porter et donner la vie dans le plaisir et le bonheur. Mais aujourd’hui, à ces femmes, je voudrais leur dire trois choses . Premièrement, merci de vous être affranchies. Deuxièmement, que si de nos jours de nombreuses femmes restent à la maison auprès de leurs enfants, pour s’occuper d’eux, les allaiter et vivre pleinement leur maternité, c’est un choix réel. Un choix entier. Elles le font car elles en ont envie, car cela répond à leur besoin et au besoin de leur enfant. Et troisièmement : d’autres temps, d’autres mœurs. Nous avons aujourd’hui, grâce à la technologie, la possibilité de travailler depuis chez nous, et de cumuler les rôles sans devoir choisir entre être maman ou partir travailler. Ainsi, beaucoup de femmes modernes cumulent les deux rôles à plein temps et s’accomplissent personnellement tout en étant auprès de leurs enfants. Ne pas être obligée de choisir : le non choix comme affirmation de celle que nous sommes : à la fois une femme et une mère, sans compromis.

Je voudrais aussi dire aux mères d’aujourd’hui quelles font de leur mieux. Comme elles peuvent. Mais elles ont surtout un gros avantage par rapport à leurs mères et leurs grand-mères, c’est qu’elle peuvent :

1. S’affranchir de ce que leurs mères ont fait pour faire autrement si elles le souhaitent… grâce aux mères d’hier.

2. S’informer. S’approprier toutes ces belles ressources qui abondent dans le sens de l’importance du maternage proximal et du respect de l’enfant en tant que personne à part entière, dans tous les aspects de son être. La différence par rapport à hier c’est que l’information est disponible et gratuite si tant est qu’on la cherche. Alors j’incite les femmes, jeunes femmes, futures mères, jeunes mères à lire et se renseigner sur tous ces sujets entourant la féminité et la maternité !

De tout temps, on a fait des erreurs. Et on en fait encore. Beaucoup. Trop. Mais si on s’arrête aux erreurs que l’on fait, c’est là que l’on commet la plus importante. Comprendre que l’on a fait des erreurs et les réparer en se disant qu’aujourd’hui on a d’autres connaissances, d’autres mœurs qui permettent de faire les choses autrement est capital pour aider le monde à avancer. Et il appartient aux mères d’hier de soutenir ce processus. Ces filles, ces petites filles qui donnent naissance aujourd’hui en 2020 savent probablement toutes que leurs mères ont fait du mieux qu’elles pouvaient dans la configuration dans laquelle elles étaient et dans le monde tel qu’il était a leur époque. Mais ce dont elles ont besoin aujourd’hui, c’est que leurs choix soient entendus, compris et soutenus.

Choisir de s’occuper de son enfant a la maison, choisir l’allaitement, le maternage proximal et vouloir le meilleur pour son enfant est une nouvelle forme de féminisme. Si dans les années 60, la contraception (hormonale) est arrivée comme une sauveuse, on sait aussi à présent qu’elle a de nombreux effets sur nos corps à long terme. C’est indispensable que les femmes aient le choix. Mais c’est encore plus important qu’elles soient informées sur les tenants et les aboutissants de ces choix… Choisir de pouvoir faire sans contraception artificielle est une double chance car d’une part on sait que la contraception existe et est disponible si nous en avons besoin mais on mesure aussi d’autre part tous ses effets à moyen / long terme. Fortes de cela, on peut alors faire un choix éclairé en conscience. Un choix qui est bon pour nous même et propre à chaque femme!

Femmes féministes d’hier, je dois vous dire que nos choix, nos besoins de revenir au naturel, de reconnexion à la terre, à nos enfants et nos lignées n’est pas un retour en arrière ou un retour au Moyen-Âge comme certaines le pensent probablement. Nous sommes bien conscientes de toutes les avancées que les combats menés à votre époque ont permis. Ce n’est pas “contre” qui que ce soit que l’on fait ce que nous faisons aujourd’hui, c’est pour nous, pour nos enfants et pour l’avenir (comme vous il y a 60 ans finalement!). C’est un choix assumé, plein et entier. Une volonté profonde de reconnexion au monde qui nous entoure. Et je vous le dis : c’est une nouvelle forme de féminisme. Un féminisme qui n’oppose pas hommes et femmes. Un féminisme qui ne recherche pas l’Égalité parfaite (impossible en soi, sinon la nature aurait donné des seins aux hommes pour qu’ils puissent allaiter les bébés) mais qui vise une équité et un respect parfait, entre adultes déjà, mais aussi vis-à-vis des grandes personnes (et enseignants) que sont nos enfants. Un féminisme qui prône une éducation non genrée dans laquelle les garçons peuvent jouer à la poupée et les filles aux pompiers. Un féminisme qui prône une parole libérée autour du consentement à tous les enfants et qui permettra certainement que les nouvelles générations d’adultes soient plus respectueuses entre elles. Ce féminisme là devrait être revendiqué aussi par des hommes, car ce féminisme là ne les exclue pas, il nous rassemble autour de causes communes, dans un objectif commun.

Je suis intimement persuadée que pour avancer, une société a besoin de cassures franches. Et le féminisme des années 60 a beaucoup fait progresser la condition féminine en France. Pour cela, je remercie sincèrement ces femmes. Vos luttes, vos combats, votre militantisme ont été précieux. Merci ! Mais 60 plus tard, nous vivons dans une autre société avec d’autres challenges. Et ce nouveau féminisme – écoféminisme – prépare une nouvelle étape d’évolution de notre société et du monde. Le patriarcat nous nuit à tous.tes, il est temps d’ouvrir ensemble une nouvelle ère, de passer à un niveau supérieur… dans l’amour et la conscience du vivant.

Bref, je suis maman allaitante et proximale. Je suis femme, je suis doula. Je suis féministe et je fais ma part pour le nouveau monde!

Texte  : Andréa Malterre – Centaurea Doula // Photo : Olga Palet

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